A l’échelle mondiale
Avec 70 % de la consommation mondiale d’eau, l’agriculture est sans conteste le secteur d’activité le plus consommateur d’eau. Depuis le début du XXe siècle, la superficie des terres cultivées en général, et celle des terres irriguées en particulier, a beaucoup augmenté pour faire face à l’accroissement de la population et des besoins alimentaires. La consommation mondiale d’eau pour l’agriculture a ainsi été multipliée par six entre 1900 et 1975.
L’irrigation, qui était déjà utilisée par les civilisations égyptienne et mésopotamienne, est encore de nos jours une technique en développement. Elle est souvent utilisée en complément de l’irrigation pluviale afin d’augmenter les rendements et d’accroître la durée de la saison agricole. Encore très souvent traditionnels (irrigation gravitaire ou par submersion dans les rizières asiatiques), les dispositifs d’irrigation ont un très faible rendement. On estime qu’avec les techniques standard, 30 à 60 % de l’eau d’arrosage s’évaporent et ne profitent pas aux cultures.
En France
L’agriculture traditionnelle était basée sur la polyculture et l’élevage. Dans la première partie du XXe siècle, le passage à l’agriculture intensive a permis d’augmenter très fortement les rendements grâce à la mécanisation des travaux agricoles, à l’introduction de la sélection végétale et animale, à l’utilisation croissante d’engrais minéraux et de produits phytosanitaires, mais aussi grâce aux progrès de l’irrigation. Cette intensification de l’agriculture répondait à un objectif alors d’actualité : nourrir la population française et développer l’activité économique agricole. Ce développement a néanmoins eu des impacts négatifs sur l’environnement, notamment sur le compartiment eau. D’une manière générale, les cultures industrielles, à travers des cahiers des charges très ambitieux, impliquent un usage massif de nitrates, de produits phytosanitaires, mais aussi un recours accru à l’irrigation.
Actuellement, 5 milliards de m3 d’eau sont prélevés chaque année en France pour les besoins de l’agriculture (voir fig. 1 pour la répartition globale). La part la plus importante (60 %) de l’eau prélevée est consacrée à l’irrigation. Cette consommation varie d’une année sur l’autre, en fonction des conditions météorologiques et du type de cultures à irriguer. Les différentes cultures sont en effet plus ou moins consommatrices d’eau. Il faut par exemple :
- 25 litres d’eau pour produire 1 kg de salade,
- 100 litres d’eau pour produire 1 kg de pommes de terre,
- 400 litres d’eau pour produire 1 kg de maïs,
- 1 500 litres d’eau pour produire 1 kg de blé.
L’exemple du maïs
Le maïs est une des plantes les plus cultivées en France. A l’origine c’est une céréale exotique, très gourmande en eau. Le maïs doit, en plus, être arrosé pendant sa période de floraison, en plein été ! Près de la moitié de l’eau utilisée en France l’est pour l’irrigation du maïs. Et cette production ne cesse d’augmenter, car le maïs ainsi produit est principalement utilisé pour nourrir le bétail. On estime ainsi que 13 000 litres d’eau sont nécessaires pour produire 1 kg de bœuf.
Les pollutions agricoles
L’élevage intensif
La concentration des élevages entraîne un excédent de déjections animales par rapport à la capacité d’absorption des terres agricoles. Ces déjections, sous l’effet du ruissellement de l’eau et de l’infiltration dans le sous-sol, enrichissent les cours d’eau et les nappes souterraines en dérivés azotés et constituent une source de pollution bactériologique.
L’agriculture intensive
La pollution agricole s’intensifie depuis que les agriculteurs utilisent des engrais chimiques (nitrates et phosphates), des herbicides, des insecticides et d’autres produits phytosanitaires pour améliorer le rendement de leurs cultures. Le rejet des résidus de produits phytosanitaires peut se faire directement dans le milieu (pendant le traitement, avec la dérive de la pulvérisation), avant et après le traitement (pollution accidentelle ou ponctuelle comme remplissage et fond des cuves). De plus les produits appliqués ne se dégradent pas instantanément dans le milieu : le produit appliqué ou des produits issus de la dégradation de ce dernier peuvent gagner les nappes ou les eaux superficielles. Ces produits ont un impact sur les milieux (perturbateurs endocriniens des poissons ou batraciens), et des effets toxiques sur l’homme. De plus ils ont un coût, la potabilisation de l’eau contaminée par ces produits nécessitant la mise en place de traitements spécifiques. Enfin, il y a un enjeu stratégique vis-à-vis des ressources en eau non contaminées qui se font toujours plus rares pour desservir les populations.
Cela dit, avec l’utilisation systématique des engrais, le rendement des cultures a fait un bon prodigieux : en 1960, un agriculteur nourrissait 7 personnes. Il en nourrit aujourd’hui 90. Mais cette agriculture intensive n’est pas sans conséquences pour l’environnement. En effet, le développement des grandes cultures (voir fig. 2) favorise :
- la spécialisation des filières et donc la monoculture, ce qui a des effets sur l’environnement, soit directement (lessivage de l’azote dans les sols, ruissellement, érosion…), soit indirectement (augmentation de la pression des ravageurs d’où augmentation de la consommation des produits phytosanitaires, ou encore augmentation des surfaces d’exploitation avec diminution de l’unité de travail humain à l’Ha ne laissant que très peu de place à l’agronomie face à un usage parfois systématique des intrants) ;
- l’utilisation croissante des produits phytosanitaires (herbicides, fongicides ou insecticides). Par exemple, les cultures à forte valeur ajoutée, comme la vigne du bassin Seine-Normandie (Champagne et Chablis), poussent les agriculteurs à utiliser des doses importantes en produits phytosanitaires.
- l’augmentation de la consommation d’eau (voir plus haut) ce qui crée des déséquilibres dans le milieu naturel.